Abréaction : le mot qui fait peur

Introduction

La grande majorité des street-hypnotiseurs ont peur de l’abréaction, au point que certains n’oseront pas se lancer dans la rue.

Ce mot est souvent utilisé à tort, et on a tendance à y mettre tout et n’importe quoi dedans. Par exemple, il est fréquent qu’un hypnotiseur en voyant son volontaire qui ne se sent pas bien, affirme qu’il fasse une abréaction. Or il n’en est rien. Cela peut-être lié à une suggestion verbale ou non verbale. Ce genre de « malaise » se produit généralement avec des hypnotiseurs qui n’ont pas confiance en eux, ou du moins qui le font paraître. Des hypnotiseurs transmettent involontairement par un effet d’empathie (amplifié sous hypnose) leur timidité ou leurs peurs.

Il est donc très important de dégager de la confiance en soi comme le précise cet article.

Qu’est-ce qu’une abréaction ?

Il s’agit en réalité d’une décharge émotionnelle liée à des souvenirs, de manière plus générale, à la mémoire du volontaire.  Elle se caractérise majoritairement par des émotions négatives, comme des pleurs, des malaises mais peut aussi se manifester par des émotions positives comme de la joie. Il n’y a pas de règles en la matière et plusieurs émotions peuvent resurgir en même temps.

Comment est-elle provoquée et comment l’éviter ?

Comme dit plus haut, l’abréaction est liée à un souvenir. Quand un hypnotiseur demande à son volontaire de se souvenir d’un endroit agréable comme la plage où il a été à ses dernières vacances, par association d’idée le volontaire peut se rappeler que son ami s’est noyé à cette plage et l’abréaction arrive.

Elle peut aussi se manifester en profitant d’une porte ouverte.  Je vais citer en exemple le cas que j’ai vécu. Avec une volontaire que j’appellerais Joséphine, après mon pré-talk, j’entame le test des doigts aimantés en étant directif et en proposant des aimants. Les doigts se rapprochent puis se collent grâce à la force des aimants. Je propose ensuite les mains aimantées, avec la même métaphore et au moment où ses mains se touchent, je lui propose de coller ses mains. Quand elle essaye de les décoller, je vois sur son visage que quelque chose se passe et les lui décolle tout de suite. A cet instant, son inconscient en a profité pour s’exprimer en faisant jaillir des larmes et amplifier le mal-être qu’elle a en elle.

Pour éviter au maximum les abréactions, il n’y a pas 36 moyens. Il ne faut JAMAIS faire appel aux souvenirs et laisser le volontaire choisir ses propres métaphores, qui seront bien plus écologiques que les votre. Je vous renvoie sur cet article pour plus d’informations.

En thérapie, l’abréaction est monnaie courante voire présente à quasiment toutes les séances. Faire remonter des émotions est très utile pour le changement. Elle est d’ailleurs provoquée volontairement par le thérapeute.

En spectacle,  les suggestions sont très directives. Par association d’idée, il est fréquent que des abréactions se déclenchent.

En street, elle est extrêmement rare. Encore plus rare si vous utilisez le clean langage. Le cadre ludique que l’on impose dans la rue protège également. Je vous renvoie vers cet article pour comprendre l’importance du cadre.

L’abréaction, si impressionnante soit-elle sur le moment, peut et doit être bénéfique pour votre volontaire. C’est ce que vous allez faire pour la gérer qui va avoir toute son importance!

Comment la gérer ?

On entend beaucoup d’hypnotiseurs dire qu’il faut bombarder le volontaire de suggestions positives pour rassurer la personne que l’on a en face de nous. Je vous répondrais « oui, mais pas tout de suite ».

Comme dit plus haut, une abréaction est une décharge émotionnelle. Si vous bombardez directement votre volontaire de suggestions positives du type « ça peut s’arrêter maintenant », « tu te sens de mieux en mieux », « tu peux sentir un immense bien-être t’envahir », vous allez peut-être stopper la décharge sur le coup,  mais que se passera-t-il une fois que votre volontaire ne sera plus avec vous ? Il risque très fortement de revivre son abréaction peu de temps après vous avoir quitté et plus personne ne sera là pour l’aider. Il sera seul.

Il est également possible que ce soit tout simplement sans effet. La meilleure (et la seule) manière est de l’accompagner comme vous le feriez avec un ami en pleurs. Il faut le laisser évacuer toutes ses émotions qui surgissent, prendre du temps avec votre volontaire, à l’écart, et après seulement lui donner des suggestions positives.

Voici comment j’ai géré l’abréaction de Joséphine.

Dès que ses larmes ont surgi, je lui ai proposé directement de s’isoler dans un coin.

Je commence à la rassurer en lui expliquant ce qui lui arrive, en étant serein extérieurement (son copain est d’ailleurs resté en retrait voyant que je savais gérer la situation et que je restais calme), et lui propose d’évacuer tout ce qu’elle a à évacuer. Elle commence à aller mieux, et j’entame des suggestions positives. Cela produit l’effet inverse, et sa décharge émotionnelle reprend de plus belle.
Je m’engage alors dans du signaling, en demandant à son inconscient si il voulait bien arrêter ses larmes, ce mal être, et de faire en sorte qu’elle se sente bien. Réponse négative.
Je pose plusieurs questions à son inconscient, mais rien y fait, il faut que ça sorte.
Je demande à Joséphine ce qu’elle ressent, ce qui se passe,  et elle me dit qu’elle a vécu quelque chose de traumatisant dans son passé et que ça a rejaillit.

J’ai donc continué à l’accompagner en lui proposant qu’elle fasse une séance avec un hypnothérapeute pour qu’elle surmonte ce qu’elle a vécu. J’ai donné ma carte et mon numéro de téléphone à son copain pour qu’il n’hésite pas à m’appeler au cas où, et pour que je leur donne les coordonnées d’un thérapeute de confiance.

Finalement au bout d’une heure, elle a pu partir sereine, et libérée, en partie, d’un poids qui la pesait depuis longtemps. J’ai eu des news et elle va bien, et va prendre rendez-vous avec un thérapeute pour faire le travail dont elle a besoin.

Par contre je n’en ai quasiment pas dormi de la nuit, je ne m’attendais pas à ressentir un lien unique avec Joséphine. J’ai ressassé et analysé la manière dont j’avais géré cette abréaction. Le fait d’avoir eu des nouvelles m’a également fait du bien.

Pour résumer :

– Mettez-vous à l’écart.

– Paraissez serein.

– Éloignez les proches trop collants.

– Faites comme avec un ami, accompagnez votre volontaire dans l’expression de ses émotions.

– Une fois que les émotions sont sorties, faites des suggestions positives.

– Demandez ce que votre volontaire a vécu.

– Proposez lui de voir un thérapeute.

– Assurez vous qu’il va bien avant de le quitter.

Et prenez votre temps, si il faut rester 2 heures avec votre volontaire, restez 2 heures !

Alban Noellet

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